Miroirs d'enfance …
Je me souviens
De ces douces matines
Où l'odeur du pain grillé
Venait vous picoter les narines
Pour mieux vous émoustiller.
Je me souviens
De cette âcre odeur
De la corne brûlée,
Que le labeur inférieur
Faisait traverser le plancher,
Transformant le parler patriarche
En patois que je ne sache.
Je me souviens
De ces levers dominicaux
Où je bondissais au plus tôt
Pour gesticuler un instant
Dans le lit de mes parents.
Je me souviens
De ces mardis après-midis dans la cour
A la lessive hebdomadaire réservés,
De cette essoreuse à manivelle,
Dans ses efforts ma mère belle,
De ces grands draps blancs transvasés
Dans ces deux grandes bassines de zinc
Que seule la canicule de l'été
Transformait en baignoire dingue.
Je me souviens
De ces longs jours d'été
De tant de fraises récoltées,
Tartinées, beurrées et sucrées à la hâte,
En cercles concentriques sur la pâte,
Dont les quelques lambeaux restants
Pour un chausson évidemment.
Je me souviens
Des longs et bons moments passés
A cent et une étapes commentées
Dans ces lacets au pied du tilleul,
Avec Anquetil, Poulidor et Pingeon,
Mais chaque jour jamais seul
Au milieu de ce peloton.
Je me souviens
De ces heures passées face au but
De la forge à la cour, balle au pied,
Amortis, slaloms et reprises de volée,
Les murs encore me traitent de brute.
Je me souviens
Du jardin bien souvent
Stade de mes sportifs exploits,
La fourche magiquement transformée
En javelot de compétition,
Au paternel de colère grand
Choux, carottes, poireaux, petits pois
Bien malgré eux chahutés
Pour mauvaise réception.
Je me souviens
De ces colères de mon père
Que je ne craignais guère,
Tant elles laissaient paraître
La gentillesse de l'être,
Qui n'avait que d'égale,
Sa prude tendresse matinale.
Je me souviens
De ces matins d'hiver gelés,
L'eau balancée la veille au soir
Pour un trottoir de patinoire,
Et maintes glissades répétées,
Attention passant ne dégringole,
C'est pour nous avant l'école.
Je me souviens
De ce matin de noël trop matinal,
Et ce jeu d'auto-kiri mal nommé
N'avions pu attendre le matin,
De cette frustration infernale
A l'arrivée de mère mal réveillée,
Pour mettre fin à ce potin.
Je me souviens
De cet autre noël mystérieux,
L'enquête de mon frère plus vieux
Pour découvrir l'antenne indice,
De ce cadeau délice,
Un privilège en ces temps
Celui du petit écran.
Je me souviens
De tous ces bonheurs tus
Qui jusqu'à ce matin,
Me paraissaient anodins,
Et qui aujourd'hui le sais-tu ?
Sont les souvenirs indélébiles,
De mon enfance à jamais paisible.
James Nar